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29 mai 2020 5 29 /05 /mai /2020 16:55

Vie de chat.

7 h du matin. C’est ELLE qui me réveille. Encore ensommeillé, je m’étire et la réprimande : je t’en donnerai, moi, des pichenettes et des miaous réprobateurs, est-ce une heure pour renaître de ses cendres ? Elle insiste, ma parle comme à un adolescent : « ah, tu as fait la java toute la nuit, mon doux, mon prince, alors maintenant, on assume ! » Je me console illico dans ma gamelle posée à côté de l’évier où elle fait sa toilette. Zut, coincées dans le dévidoir les croquettes ! Je lui demande d’un coup de patte sur son bras de secouer la boîte. Puis j’attends près de la porte qu’elle sorte de la salle de bain, et la précède jusqu’à l’entrée, où le chien balaie déjà l’air avec sa queue pour sortir.

 

7 h 30. Je suis dehors, assis sur l’appui de fenêtre et observe les oiseaux... Encore un peu tôt pour aller m’amuser derrière eux. En plus, il bruine ! Allons, un petit numéro de charme à travers le carreau de la cuisine où elle prépare le café, pour qu’elle m’ouvre. Je couine à qui mieux mieux. Oui ! J’entends dans le couloir le bruit de ses pantoufles, elle arrive ! Je traverse en coup de vent le pont de ses jambes et cours à la gamelle d’eau, vite, avant le chien ! Je bois longuement, je m’y installe... Elle a dit que je suis son prince, alors, le chien, il attendra. Et puis, la nuit et ses agitations nocturnes m’ont donné une de ces soifs !

 

9 h. Son premier rendez-vous avec un étranger que j’ignore superbement. Je m’échappe au moment où elle l’accueille, ce visiteur ne mérite pas que je m’y attarde, trop occupé dans ses pensées. Il ne voit rien, ne sent rien, pas même ces délicieux effluves distillés par le soleil séchant la rosée. Pâquerette ou herbe à chat, peu importe, seules mes dents pointues s’y collent et déchiquettent avec délices les feuilles tendres. Elle clôt son bureau à double tour. L’échange de ses secrets professionnels ne me concerne pas... La matinée se passe en explorations diverses jusqu’au moment où je reviendrai m’allonger, pattes en avant, pour ma première sieste, de préférence dans une chambre à coussins, peut-être sur son lit, si elle n’y fait pas attention... Si elle m’ouvre.

 

Midi. Je redescends sur mes pattes de velours, mais le bois des marches d’escalier résonne, ce traître. C’est l’heure où ELLE et LUI s’arrêtent pour prendre ensemble leur repas. Le chien est là, à distance respectable, en bas des marches qui les séparent du salon. C’est sa place, là, couché ! Le chien comprend le langage des hommes, moi pas ! Et c’est bien ainsi ! Car comme ça, c’est moi qui commande ! Dans la cuisine, je m’étire indolent en baillant au pied du meuble sous-évier, clignant des yeux attentifs et mi-clos,  je surveille si quelque miette tombe de la table. Si elle me regarde, alors, je me redresse et marche droit sur ma maitresse en lui frôlant au passage les mollets de ma queue droite. Elle aime ça, la garce, et lui aussi, je crois, mais leurs secrets d’alcôves ne m’intéressent pas,  et  je me replie, l’air de rien, sur la hauteur du strapontin d’où je peux mieux surveiller la table et ses garnitures. Surtout ne pas leur démontrer mes intentions gourmandes, c’est moi le maître, ici, et je sais m’y tenir.

 

12 h 30. Mes intendants ont débarrassé leur déjeuner et mis la vaisselle dans la machine qui ronronne, pour montrer qui est le plus fort. Peu me chaut ! Sont-ils allés prendre la sieste ? Ce serait le moment de partir en chasse… J’assourdis de la patte le bruit d’une cuiller que j’ai bousculée avec le museau en léchant la sauce au beurre collée dans leur écuelle, oubliée malencontreusement dans leur évier… Mon hôtesse m’a entendu, car sa voix de soprane lance un « Schpountz ! » sonore et antipathique qui me vrille les tympans.  Je descends d’un bond les deux pièces qui me rapprochent de mon divan de velours, l’air non coupable de l’animal qu’on accuse à tort.  Je lui rappelle d’une œillade bien envoyée que, vu le bazar dans cette cuisine, heureusement que je suis là pour nettoyer derrière eux !

 

13 h. Quitter le bas du barbecue où il fait plus frais pour me placer en terrasse, à proximité du chien, méthode-séduction pour qu’il m’attaque pas, mais l’emmerder quand même.

 

13 h 30. Grimper sur le tas de compost où il fait plus chaud, à la recherche d’une proie. S’en désintéresser aussitôt, c’est pas l’heure, et venir frôler du dos le transat de celle qui fait la sieste au soleil. Retourner s’allonger sous le dit-transat, tête et pattes dans le prolongement l’une des autres,  méthode - « vous pauvres humains tout droits, demandez-vous comment j’y arrive ! »

 

14 h. Réveil placide. Chasser une bête rampante qui se chauffe au soleil... Peu amusant ! Elle ne court pas et se tortille bêtement sous mon emprise. Je reste avec sa queue dans ma gueule, elle s’est détachée du reste du corps. Mon valet qui bêchait le jardin s’approche et déclare : « Oh, un orvet ! » Je croyais l’intéresser, mais il me laisse là avec ce tortillon dont l’autre moitié s’enfuit dans les herbes. Je leur tourne le dos à tous, très déçu !

 

18 h. Pendant qu’ils mangent quelques fraises à la crème fraiche,je m’enivre les narines de cette odeur alléchante. Je grimpe sur les genoux de Mamourette,mais impitoyable, elle me repousse de la main. Lui repasser ma botte secrète à moi, quelques coups de queue bien placés, histoire qu’elle s’attendrisse sur ma fourrure. Ça marche ! Je la vois remplir sa cuiller de crème, la déposer délicatement par terre, tout près de moi. Ensuite, elle me présente son bol vide. Slurp ! Je m’empresse de le lécher de ma langue rêche, j’adore ce bruit !

 

20 h. Après ma dernière scène devant la télévision, câlins d’amour et tutti quanti, petite toilette minutieuse, préparer la sortie en boite ! Des miaous tonitruants devant la porte : vont-ils céder ? Le mâle dominé prévient : « si on le lâche maintenant, il va passer la nuit dehors ! » Elle acquiesce : « la nuit dernières, il nous a cassé les bonbons ! » Je ne sais pas ce que cela veut dire en langage humain, en tous cas, ils m’ouvrent. Yes ! Les étoiles brillent, la nuit tous les chats sont gris sauf moi, j’ai mis mon beau pyjama rayé ; à moi les filles, allons danser sous la lune !

 

21 h et des fafiotes. Dans le quartier, il y a un gros matou, un géant, une terreur, un roi de la jungle… mes maîtres ne m’avaient pas prévenu… J’ai passé toute la nuit dans le cerisier à gueuler qu’on vienne me chercher… à plus de minuit, c’est LUI qui est venu me cueillir avec l’échelle. Avec cette phrase, quel culot, ai-je bien compris  : « alors, mon petit schpountz, on fait des galipettes ? »

 

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